Témoignage: Maria Gonzalez
Ramon Perez: LES APPARITIONS DE GARABANDAL
Maria Gonzalez , 63 ans
Mère de Jacinta
La première fois que j’en ai entendu parler, j’étais dans la cuisine et Jacinta m’a dit :
— Tu sais, maman, nous étions dans la “calleja” en train de prendre des pommes et, tout à coup Conchita a poussé un cri tout en regardant en l’air. Nous étions sur le point d’aller chercher Aniceta car nous ne savions pas ce qui arrivait à Conchita. Nous regardons à notre tour et nous voyons un resplendissement… et nous restons semblables à Conchita.
La première personne qui m’en a parlé est donc Jacinta, mais je ne la croyais pas, et n’en parlai pas à mes familiers. Maintenant quand j’y pense, je me dis:
- Comment est-ce possible que nos quatre familles aient eu une telle conduite avec les fillettes, à ce moment-là ?
Tenez. Il ne me venait pas à l’idée d’en parler à qui que ce soit, car je voyais cela comme une histoire de gosse, cela m’entrait par une oreille et ressortait par l’autre. Je n’en faisais aucun cas. D’ailleurs les mères des trois autres ne m’en parlaient pas et moi non plus. Nous ne nous sommes pas réunies pour en causer. Non, aucune concertation entre les quatre familles, rien.
Huit jours après, comme nous allions au jardin, elles ont appelé l’une d’entre nous, Clémenüna, et lui ont dit :
- Viens avec nous, car on ne nous croit pas… Tu verras bien.
Alors quelques-unes ont suivi et ont été troublées de les voir ainsi. Elles l’ont dit à tout le monde. Ça s’est commenté et les gens ont commencé à aller voir.
Moi, ce que j’ai ressenti en assistant à la première extase, je crois que je m’en souviendrai jusqu’à ma mort J’ai cru devenir folle. C’était dans la calleja, les fillettes y étaient toutes les quatre. Simon, mon mari, n’est pas venu, il avait peur que ce soit une sottise quelconque; il s’est adossé au transformateur; de là, il observait et il disait:
— Si je vois que c’est une mauvaise plaisanterie ou qu’elles font quelque chose de mal, je ne pourrai pas me contenir.
Parce qu’il est assez vif de tempérament II a assisté de loin à cette extase, et il a beaucoup regretté ensuite, car tout le monde s’est bien conduit et cela l’a intéressé.
Je ne me souviens plus si, à notre arrivée, elles étaient déjà en extase. Ce que je sais, c’est qu’en voyant ma fille dans cet état, j’ai poussé de tels cris qu’on m’a mis la main sur la bouche pour les étouffer, en me maintenant de force. Moi, je faisais de tels efforts pour me dégager et crier que, depuis, j’ai une petite gêne ici dans la gorge. J’aurai ce souvenir dans la mémoire toute ma vie.
C’est que je n’avais jamais rien vu de semblable et je ne cessais de me demander ce que ça pouvait être, bien que, depuis huit jours, Jacinta me décrivait ce qu’elle voyait à chaque extase. Mais chez nous personne ne la croyait et pourtant elle nous donnait des détails:
— Aujourd’hui nous avons vu une grande lumière… Aujourd’hui nous avons vu un écriteau avec des lettres que nous ne connaissons pas… Elles descendaient en pleurant, elles allaient prier à l’église en pleurant.
Un jour le curé ou la maîtresse d’école avaient dû leur dire de demander le nom de la personne qu’elles voyaient et ce qu’elle voulait Jacinta me dit qu’elles lui avaient posé la question. Ce jour-là aussi, elle m’a raconté qu’elles avaient vu un personnage comme un nouveau-né… Moi j’ai commencé à pleurer et à rire; c’était nerveux. Jacinta décrivait:
—Aujourd’hui, il avait les cheveux jusqu’aux épaules, son teint était comme celui des pois chiches…
Je commençais à être troublée car elle me racontait tellement de choses !… A tel point qu’un jour, j’ai éprouvé le besoin d’aller au magasin voir Lena, une de mes cousines, et je lui ai dit:
— Ah, quelle histoire Lena !… Tous les jours Jacinta me raconte des choses extraordinaires et aujourd’hui encore elle m’a dit qu’elle a vu telle et telle chose… et je pleurais et riais tout à la fois.
A partir de ce moment-là, sans croire l’enfant, je commençais à me poser des questions. Un jour, elle me dit que c’était un ange, qu’il avait des ailes. A quoi mon gamin Miguel-Ange, qui était très placide, lui répond:
— Bah !… ça doit être un gros oiseau avec des ailes !…
C’est ainsi que cela a commencé, jusqu’au jour où nous sommes allés voir et où j’ai éprouvé une émotion si violente.
Par la suite, j’avais beaucoup de respect pour l’apparition et je ne pouvais pas supporter que les spectateurs bavardent Mais je n’arrivais pas à comprendre: … Qui cela peut-il bien être? Mon Dieu, comment est-ce possible? Quelquefois, j’étais convaincue, je disais: il y a quelque chose là puis les doutes me reprenaient et je me reposais la même question: Qui cela peut-il bien être, mon Dieu, qui cela peut-il bien être? Les idées les plus variées me passaient par la tête. Les petites n’avaient jamais quitté le village et n’étaient pas très instruites. Je n’avais pas souvent envoyé Jacinta à l’école ; elle savait lire, mais très peu.
Un jour, je dis à Mari-Loli et à Jacinta :
— Vous ne savez pas, les enfants, ce que nous allons faire ? Je vais mettre ici une petite bouteille d’eau bénite et, quand vous verrez l’apparition, vous la lui jetterez et, si c’est le démon, il s’en ira.
C’est étrange, elles ont eu une apparition et ont pris la petite bouteille. Ce jour-là, il y avait là une dame qui s’appelait Chon, de Burgos, et une jeune fille qu’on disait juive, Caterina. Elles étaient assises là-bas et les fillettes là où vous êtes. Elles ont jeté l’eau vers l’apparition et elle est toute retombée sur la juive qui s’est convertie. Plusieurs fois depuis, des gens sont venus faire l’expérience avec de l’eau naturelle. Ils jettent l’eau de la même façon et elle tombe, comme c’est logique, devant eux, tandis que, ce jour-là, l’eau est partie d’ici et est retombée sur la juive, c’est-à-dire dans la direction opposée à celle d’où on la lançait La jeune fille a été très remuée et s’est fait baptiser après avoir attendu d’être majeure, car ses parents étaient juifs.
J’ai vu beaucoup d’extases, beaucoup… Leur durée était très variable, elles se produisaient n’importe où; quelquefois lorsque les enfants étaient à la maison, les extases se produisaient chez nous.
Comme il leur arrivait de sortir, la nuit en extase, toutes les quatre, une fois, nous en avons laissé une dans chacune de nos quatre maisons, sans réveil ni rien de ce genre, pour voir si elles allaient pouvoir sortir ensemble. Oui, oui, nous leur avons fait subir cette expérience… pour voir… sans montre ni réveil… et elles se sont retrouvées… Cette expérience nous l’avons faite plusieurs fois par la suite et Simon disait: Qu’est-ce que cela peut bien être ?… Que peuvent-elles voir ?
Synchronisme des gestes:
Tenez, il arrivait que deux d’entre elles tombent en extase ici par exemple, et les deux autres plus loin, derrière elles. Eh bien, quand ces deux dernières commençaient à prier, les deux qui étaient devant faisaient de même. Les deux de devant faisaient le signe de croix, celles de derrière le faisaient en même temps. Elles faisaient le même geste en même temps, exactement pareil, sans se voir…
Elles sortaient de l’extase en meilleur état que ceux qui les suivaient L’aîné de mes fils qui avait 19 ans (Jacinta en avait 12), et qui est costaud, les suivait en courant, et elles, en extase, les mains tendues ainsi pouvaient s’arrêter net, d’un seul coup, tandis que mon garçon et les autres allaient s’arrêter plus loin en avant, entraînés par l’élan. Elles se retrouvaient aussi fraîches que si elles n’avaient pas couru. Mais nous n’avons pas bougé de là-bas, disaient-elles. Non, aucune trace de fatigue. Malgré le manque de sommeil, elles allaient au travail le lendemain — travail ou autre occupation — sans gêne apparente. Elles racontaient en détail leurs activités de la journée à leur apparition. C’est pour cela qu’on ne peut pas dire que toutes les extases étaient semblables.
Une fois, les enfants étaient déjà en extase, un peu plus bas que le cuadro, quand nous sommes arrivés. Je me suis approchée de Jacinta et, ce jour-là, je crois bien que j’aurais eu plaisir à battre les médecins qui étaient là. L’un d’eux a attrapé une des jambes de ma fille au moment où elle tombait à genoux en extase, ce qui a eu pour effet de lui replier la jambe saisie sous elle. Elle ne s’est reçue que sur un genou, la jambe repliée ne touchant pas le sol, dans la position où elle se trouvait quand le docteur l’a lâchée. C’était toujours ainsi quand les enfants tombaient en extase, elles restaient dans la position où l’extase les avait saisies. [Ce qui montre avec quelle rapidité foudroyante l’extase les prenait Ensuite, bien sùr, les enfants se mettaient en mouvement.] Elle est restée dans cette position avec un seul genou sur les cailloux, les mains en l’air, pendant plus d’une heure. Moi, de la voir ainsi, je souffrais, mais pas elle. Alors ils se sont mis à lui piquer la jambe— car ils leur piquaient les jambes —mais ça ne saignait pas. L’extase terminée Jacinta me dit :— Maman, la Vierge m’a dit qu’on était en train de me piquer la jambe… Nous avons alors regardé ses jambes et les traces de piqûre, mais ça ne saignait pas.
Bien souvent, j’ai essayé de prendre la pose de Jacinta, ainsi sur un genou, je n’y suis jamais arrivée.
Une autre fois, des messieurs lui touchaient les yeux avec des bâtonnets, pour voir ses réactions.
Maintenant, quand on la photographie au flash, elle s’écrie : Ah ! je suis aveuglée tandis que, lorsqu’elle était en extase, les flashes se succédaient sans arrêt et elle ne cillait même pas.
Ce qui s’est passé ici, nous ne savons pas ce que c’est Personne n’est capable de l’expliquer.
Aspect au toucher – Force physique:
Je me rappelle qu’une fois Jacinta avait une angine ; aussi était- elle couchée. C’était dans l’ancienne et vieille maison. H pleuvait, et Jacinta ce jour-là s’était levée. Moi je ne pensais pas qu’elle puisse avoir ime apparition. Au moment où nous nous y attendions le moins, elle tombe à genoux en extase. Je me mets à la porte, bien décidée à ne pas la laisser sortir à cause du temps et de son angine. Je ne lui fais pas part de mes intentions, mais en moi-même je me disais : tu ne franchiras pas le seuil de cette maison. Tout en pensant cela, je la regardais qui n’arrêtait pas de donner des objets à baiser à son apparition. Tout d’un coup, gentiment, tranquillement, elle vient à moi, me prend par le bras et sort doucement !… Je n’ai pu opposer aucune résistance, je ne sais même pas comment elle m’a saisie !… elle n’avait que 12 ans…
J’ai couru après elle pour lui faire mettre une veste. J’avais beau la lui mettre sur les épaules, elle tombait toujours, elle ne tenait pas. J’ai vite couru chez Mari-Loli qui n’était pas en extase et lui ai demandé de venir la mettre à Jacinta. Ce sont des choses qu’elles se faisaient entre elles, même quand l’une d’elles n’était pas en extase. Ainsi, un jour, Loli est tombée en extase au moment où elle mettait une ampoule électrique et personne ne pouvait lui enlever l’ampoule des mains. Il a fallu que Jacinta y aille.
Quand elle m’a prise par le bras, j’ai senti un contact physique dur, comme quelque chose de très rigide, ni froid, ni chaud, très rigide.
Oui, j’y ai assisté. Il y avait Jacinta et Maria-Dolores, Conchita devait être souffrante. Dans la journée, elles avaient déjà eu une extase et nous avaient annoncé qu’elles en auraient une autre le soir à 22 h et que nous ne devions pas franchir la limite fixée par une étable qui était là-bas. Les petites me disaient cela ainsi qu’aux gens du village et à tous ceux qui étaient là.
Nous les avons donc laissées seules et tandis que nous attendions de voir ce qui allait arriver, elles ont commencé à pousser de tels cris… que mes jambes se dérobaient sous moi ; quelqu’un m’a soutenue. Nous étions persuadés que nous ne verrions pas la Fête- Dieu qui avait lieu le surlendemain.
Il se trouvait là un religieux qui, tout à fait par erreur, avait abouti à Garabandal — ce n’est pas la direction qu’il devait prendre — et ce Père s’est mis à prier quand elles pleuraient ou criaient Et alors elles se taisaient, mais dès qu’il cessait, les petites recommençaient à pleurer et les gens aussi.
Les fillettes sont enfin descendues un peu plus bas, ce qui m’a permis de m’approcher d’elles. Elles se sont arrêtées à l’endroit de la calleja où elles avaient vu l’ange pour la première fois, et elles pleuraient, pleuraient !… Moi je me disais :
— Mon Dieu, mais qu’est-ce donc ? Que peuvent-elles bien voir ?
Elles ne nous disaient rien mais, arrivées à la maison de Céférino, elles ont écrit un petit mot — je ne sais trop quoi — disant que tout le monde devait aller se confesser, qu’un châtiment allait arriver…
Oui, tout le monde a été se confesser sous le coup de cette peur affreuse ; nous pensions alors qu’il allait nous arriver… je ne sais pas quoi.
Nous nous sommes confessés et nous avons communié comme si nous étions sur le point de mourir. Ce fut une bonne, très bonne confession.
Au jour suivant, Conchita était présente et les cris de terreur ont recommencé. Les petites nous avaient dit de rester là dans la calleja, ce que nous avons fait toute la nuit, pour ne pas les laisser seules. Nous étions assez nombreux. Mais vraiment ces nuits-là, la peur était présente. Sainte Mère !… ce que les gens pouvaient pleurer !…
La commission de Santander:
Une nuit, la commission est venue, ici, pour sortir Simon du lit à minuit Je ne me rappelle pas combien ils étaient Ils sont allés aussi chez Céférino. Ils venaient chercher Jacinta et les autres, pour les enlever du village. Ils voulaient les emmener ailleurs pour les distraire et leur faire oublier leurs visions.
C’est la seule fois où la commission s’est occupée de nous, autant que je m’en souvienne.
Cette nuit-là, Simon leur a répondu :
- Ecoutez-moi bien. Tout ce que vous me dites me laisse indifférent, ça entre par une oreille et ça ressort par l’autre. Si vous m’obligez à faire sortir ma fille de ce village, je l’emmène là-haut dans un hivernal ; elle n’ira pas en bas, car elle est mineure et personne ne me la prendra.
Ils venaient nous l’enlever ! Ça a réussi avec Conchita, parce que son père était mort, sinon elle ne serait certainement pas partie. Ils ont d’abord essayé avec Jacinta.
Non, non, la commission n’est jamais venue ici nous interroger une autre fois.
Je ne devais pas être auprès d’elles le jour où, en extase et pour la première fois, elles ont annoncé tout haut leurs futures négations et contradictions. Mais je le savais, je les avais entendues dire qu’il y aurait beaucoup de contradictions, que les familles se fâcheraient entre elles ; et d’autres histoires de ce genre ont été prophétisées. Tout cela s’est réalisé. A cette époque, je ne pensais pas que de telles choses puissent nous arriver, je n’y croyais pas.
Pour mon compte, je n’arrivais à comprendre ce qui se passait et je ne cessais de me poser la question :
- Qu’est-ce que ça peut bien être ? Tout ce qu’elles annoncent se réalise ; qui peut bien le leur dire ?
La Vierge leur avait dit qu’une voix les appellerait et qu’elles devraient la suivre. Aussi quand j’ai entendu Jacinta dire cette nuit- là :
- Quoi ? Il faut que nous te suivions ? J’ai été effrayée, parce que je me disais : Et si elle leur ordonne de se jeter du haut des rochers ?
Mari-Cruz criait :
- Si tu ne nous dis pas qui tu es, nous rentrons chez nous.
Par la suite, les petites ne nous ont jamais reparlé de cette voix. Ça s’est passé près de l’église.
Nous pourrions encore en parler toute la journée, tant de choses pourraient vous être encore racontées…
Ramon Perez: LES APPARITIONS DE GARABANDAL |